Notre agriculture a besoin d’une détox !

 

Le réseau Slow Food se mobilise contre les pesticides dans toute l’Europe

 

Slow Food Europe – 2 Novembre, 2022

Au vu des tentatives par plusieurs États membres et groupes européens d’affaiblir ou de retarder la proposition par la Commission européenne de la directive pour une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable (UDP), il est crucial pour les décideurs politiques d’entendre nos appels à un objectif européen ambitieux réduisant l’usage des pesticides de 80 % d’ici à 2030 et leur interdiction totale d’ici à 2035, et soutenant les exploitants dans leur adoption de pratiques agroécologiques.

Pendant le mois d’octobre, Slow Food a rejoint les Journées Européennes d’Action 2022 de “Good Food Good Farming”, dédiés à la sensibilisation sur les pesticides : plusieurs groupes locaux de Slow Food ont rejoint d’autres organisations européennes et organisé des évènements dans toute l’Europe, de la France aux Pays-Bas en passant par la Croatie et la Grèce, pour promouvoir l’agrobiodiversité et sensibiliser au besoin de passer à une agriculture sans pesticides.

Pour Marta Messa, Secrétaire générale de Slow Food : « Alors que de nombreux acteurs tentent de réduire à néant toute tentative de transition hors des pesticides de synthèse, les communautés sur le terrain s’organisent et proposent des moyens concrets de produire de la nourriture sans nuire à la nature. Il est temps que nos décideurs politiques européens et nationaux nous écoutent et agissent ! »

 

Voici un résumé des principaux évènements :

France

Le 16 octobre, les vignerons bio du Groupe DEPHY Côte Chalonnaise (dont plusieurs producteurs Slow Food français sont membres) se sont rassemblés en Bourgogne. Le Groupe DEPHY entend développer et tester des méthodes permettant de réduire l’usage d’intrants synthétiques. Ils ont échangé sur la manière dont les vignerons peuvent diminuer leur usage des pesticides et développer des techniques agroécologiques dans la production de vin.

 

Roumanie

Le 14 octobre, Slow Food Turda a organisé une Disco Soup (action aux airs de fête durant laquelle on transforme des légumes destinés à la poubelle en délicieuse soupe) dédiée aux jeunes de Cluj pour fêter la Journée mondiale de l’alimentation. Le groupe a invité les producteurs, consommateurs et décideurs locaux à échanger sur les dangers des pesticides et les alternatives offertes aux exploitants.

Allemagne

Le Slow Food Youth Network de Hambourg a organisé une visite ouverte au public de la ferme bio Gut Wilkenshoff. L’objectif de la visite était de sensibiliser à l’agriculture agroécologique sans pesticides, à des prix justes pour les petits exploitants et au plaisir de planter et manger local et de saison.

Pays-Bas

Slow Food Netherlands organisera le 5 novembre une manifestation pour présenter officiellement ses 8 recommandations politiques, pour des politiques alimentaires locales durables, à l’approche des élections provinciales organisées début 2023. Slow Food Netherlands appelle tous les acteurs à l’ambition en matière d’alimentation et les municipalités à jouer un plus grand rôle pour assurer une alimentation saine, durable et locale pour tous, et redonner de la visibilité à la nourriture au sein des villes.

Croatie

En Istrie, le réseau a opté pour l’angle pédagogique et organisé des ateliers sur les méthodes agroécologiques permettant de se passer des pesticides : solutions permacoles, compostage, variétés locales, jardinage durable, etc. Les enfants étaient invités à découvrir et planter des variétés autochtones.

Suède

Les communautés Slow Food se sont jointes le 21 octobre au groupe des “Fridays for Future Stockholm” pour mener une manifestation devant le parlement suédois, appelant à une diminution des pesticides dans l’agriculture et au soutien des exploitants dans leur transition vers l’agroécologie. S’en est suivi un pique-nique à base de produits régionaux durables, ainsi que des échanges avec les passants pour sensibiliser aux pesticides, aux pollinisateurs et à leurs demandes pour un nouveau système alimentaire.

 

Le mois Good Food Good Farming a atteint son apogée le 27 octobre avec une manifestation à Bruxelles devant le Parlement européen. De nombreuses organisations se sont rassemblées pour appeler l’UE à maintenir des objectifs forts de réduction des pesticides dans sa directive pour une utilisation durable des pesticides (UDP). Les pesticides sont les principaux responsables du déclin de la biodiversité et présentent un risque sanitaire pour les humains, surtout ceux qui travaillent et vivent à proximité des fermes, comme l’a démontré un récent rapport rédigé par la coalition Good Food Good Farming, dont Slow Food est membre du comité de pilotage.

Le « Pesticide CheckUp » est une action scientifique et citoyenne durant laquelle 300 Européens ont envoyé des cheveux pour y analyser la présence ou non de 30 pesticides actuellement autorisés au sein de l’UE. Le rapport indique qu’on retrouve des résidus de pesticides dans les cheveux d’environ un tiers des personnes testées (87 des 300 participants, soit 29 %). Les résultats pointent également la récurrence des pesticides dans les cheveux des agriculteurs et ouvriers agricoles (43,5 %), prouvant ainsi que ces travailleurs sont les plus exposés aux pesticides et ainsi les plus vulnérables à leurs dangers sanitaires.

Malgré ce que l’agrobusiness veut nous faire croire, les alternatives aux monocultures intensives, polluantes et gourmandes en pesticides existent, et elles fonctionnent. Le système agricole actuel pose de nombreuses menaces à la santé des citoyens européens, en contact avec les produits chimiques à leur insu. Ceci est inacceptable, et de nombreux citoyens européens veulent que ça change, comme l’a prouvé l’initiative citoyenne européenne (ICE) « Sauvons les abeilles et les agriculteurs » signée par 1,05 million de citoyens européens et validée officiellement par la Commission européenne ce mois-ci.

Le 26 octobre, la Commissaire européenne à la Santé et à la Sécurité alimentaire Stélla Kyriakídou a déclaré que la situation engendrée par l’invasion de l’Ukraine et la crise sanitaire du COVID n’étaient pas des raisons pour repousser la transition vers des systèmes alimentaires durables, et qu’au contraire, il fallait l’accélérer. Slow Food ne peut que saluer cette prise de position et appeler tous les décideurs européens à s’engager envers la stratégie De la ferme à la table et à agir réellement pour limiter au maximum l’usage des pesticides, en commençant par interdire leur usage préventif, en agriculture mais aussi pour le jardinage et la sylviculture.

Les pratiques de lutte intégrée contre les organismes nuisibles doivent devenir obligatoires pour les exploitants, et les politiques européennes doivent soutenir la transition vers l’agroécologie et encourager les systèmes de gestion agricole rétablissant la symbiose entre nature et agriculture.

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