Sally Barnes
Du sel, de la fumée et du savoir-faireIreland La Woodcock Smokery se trouve non loin de Castletownshend, un village gracieux en bord de mer dans la région irlandaise de West Cork, lieu de traditions liées à la pêche. L’histoire de notre entreprise de fumaison commence en 1981. À cette époque, mon mari, pêcheur, rapportait à la maison beaucoup de poisson frais, exquis, que nous aimions cuisiner et manger. Mais n’ayant pas de congélateur, j’ai commencé à expérimenter la fumaison pour conserver le poisson en excès et pour en valoriser les arômes naturels. Lors de mes premières tentatives j’utilisais une boite à thé en bois ; je mettais une petite poêle remplie de braises en dessous du trou situé au fond de la boîte et j’accrochais le poisson au-dessus de celle-ci. Par la suite, j’ai acheté un four électrique. L’ancienne méthode – qui consiste à saler puis à sécher par fumaison la superficie de la chair – demande beaucoup de temps, mais garantit un produit d’excellente qualité. Tous les passages sont faits manuellement et il faut être très habile, surtout lorsqu’il s’agit de fileter et de saler le poisson frais. Il est aussi extrêmement important de comprendre lorsqu’il est opportun d’interrompre le processus de fumaison. L’art de la fumaison a pratiquement disparu au cours des années et nombreux sont ceux qui ont cédé aux arômes naturels, aux colorants et aux conservateurs pour accélérer le processus. En tant que mère, je ne voulais pas que mes enfants mangent des substances artificielles et, dès le début, j’ai décidé d’utiliser le bois. Mes harengs fumés semblaient anémiques à côté des autres qui étaient oranges et pleins de colorants. J’ai tout de même décidé de continuer mon petit bonhomme de chemin, et il n’y a pas eu longtemps à attendre avant que les colorants ne soient interdits par l’Union Européenne. Nous choisissons du poisson durable et, dans la limite du possible, nous achetons directement aux fournisseurs locaux en espérant ainsi contribuer à soutenir les familles des pêcheurs, leur travail et leurs revenus. Je dors plus sereinement la nuit, sachant que nous faisons de notre mieux ici pour aider notre communauté. J’ai participé en 1996 au Salon du Goût à Turin et je soutiens Slow Food avec ferveur. Nos vies ont désormais un rythme tellement accéléré que nous ne réussissons plus à profiter du temps consacré à la cuisine, ni au plaisir de manger en bonne compagnie. Nos méthodes sont consacrées par l’usage, elles respectent les recettes traditionnelles. Nous n’y mettons que du sel, de la fumée, du savoir-faire et énormément de temps. Aucun poisson n’est plus slow que celui-ci ! Sally Barnes
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