Innocent Nkoso Mwe
Gardiens des eaux depuis trois générations
D. R. Congo
Innocent Nkoso Mwe est pêcheur dans la région de Kinshasa, en République Démocratique du Congo. Engagé auprès de plusieurs associations dont Slow Food, il est venu à Terra Madre 2010 comme délégué et s’efforce de défendre les eaux régionales et leurs ressources.
La pêche, c’était déjà le métier de mes parents et de mes grands-parents. Cela fait donc trois générations! Je suis dans le métier depuis 1994, juste au moment de l’arrêt de mes études. Mon papa était trop fatigué physiquement et ne pouvait plus faire face aux frais d’université.
Je pêche et évolue dans la vie associative. Je tente de lutter, à petite échelle, contre la destruction de l’écosystème aquatique et de l’environnement. Je suis Président d’une association nommée Association des Pêcheurs Locataires pour la Lutte contre l’Insécurité Alimentaire de Kinshasa, APPLIAKI/Asbl en sigle, et j’en suis le fondateur; je suis aussi le Trésorier de l’Union des Associations des pêcheurs de Kingabwa. Je suis également secrétaire d’une coopérative de commercialisation des poissons appelée CCPK.
Avant, j’avais des journées fixes, mais je suis en train de diversifier mes activités. Je viens ajouter à mes travaux de pêche le petit commerce et le maraîchage.
J’ai un horaire de travail qui me permet de bien combiner ma vie professionnelle et personnelle. Je me lève à 5h30 et pour me coucher à 21h00; je pratique une pêche artisanale avec un filet maillant de fond, au Pool Malebo, avec une pirogue en bois et une pagaie. La pêche aux filets maillants est utilisée pour attraper les gros poissons du fleuve. Je travaille 4 jours par semaine et la période que je préfère c’est la nuit.
Les techniques de pêche utilisées dans la région ne sont pas toutes durables, et il n’est pas toujours facile de savoir faire le tri. C’est la raison pour laquelle la FAO et le gouvernement viennent de vulgariser un document sur le code de pêche responsable en RDC.
J’essaie de faire de mon mieux pour la protection de l’environnement, ainsi que les associations avec lesquelles je travaille. Avec l’association CARS, nous venons par exemple de défendre la grande frayère et le site de pêche de Kingabwa, menacés par des prédateurs d’espaces vides étrangers et nationaux.
Ce sont mes plus grandes craintes: que les réserves halieutiques s’épuisent et que l’environnement du Pool Malebo soit détruit et spolié par les prédateurs d’espaces vide.
Mais j’ai aussi de belles récompenses… Par exemple, grâce à la pêche, j’ai de quoi subvenir aux besoins de ma famille. J’ai également découvert l’Italie à l’occasion de Terra Madre 2010.
Je travaille avec des membres de ma famille et avec les collègues membres de l’Association APLLIAKI/Asbl dans le cadre de la pêche groupée. Je vends aux mareyeurs, aux coopératives et auprès de quelques restaurants de Kinshasa. Mes rapports avec les pêcheurs, revendeurs et consommateurs sont des relations professionnelles et tout à fait cordiales.
Le Pool Malebo, le fleuve Congo et ses rivières doivent être protégés par des lois votées par les législateurs de la RDC avec l’appui des organisations non gouvernementales. Il faut mettre en place des régulations pour une pêche plus responsable et agir contre la surexploitation. A plus petite échelle, le pêcheur devrait être le premier gardien des eaux, car l’eau c’est notre mère, elle nous procure la vie sous toutes ses formes. Le pêcheur devrait, au premier plan, jouer le rôle de défenseur des eaux et de la vie qui s’y trouve. »