Pour une métamorphose joyeuse

30 Oct 2017

 width=L’assiette pèse lourd sur le climat. Dans le monde occidental, l’agriculture émet environ 20% de GES. Arrivée sous notre fourchette la nourriture a grossi son empreinte climatique avec la chaîne du froid, le transport, la transformation en usine, au restaurant, à la maison.

Selon ce que l’on mange, chaque bouchée d’un mets participe à l’emballement de la machine climatique ou, au contraire, à son ralentissement. Chaque mangeur a sa part dans la bataille pour endiguer le réchauffement climatique en dessous de 2° d’élévation moyenne de la température. Cette limite est déjà énorme.

Champ de bataille

Nous avons tant dépassé les seuils de destruction de la biodiversité avec tout ce que cela implique de déséquilibres écosystémiques, d’atteintes aux milieux naturels par l’extraction minière, la déforestation, la poldérisation, l’urbanisation, la fragmentation des territoires, les pollutions de l’eau, du sol, de l’air que nous avons définitivement changé la Terre et la nature qu’elle porte. Il ne s’agit plus de discourir sur les causes d’une crise qui serait passagère, nous sommes sur le champ de bataille de la guerre perdue que nous avons mené contre la nature. Il s’agit de regarder devant, de trouver les chemins de la paix et de la reconstruction d’une vie qui ne sera jamais plus comme avant la carbonification de notre atmosphère. Nous en avons pris pour des siècles, il faut s’en rendre compte. Ce n’est pas nécessairement catastrophique, mais il faut accepter de revoir entièrement notre mode d’habiter la Terre. Façons d’habiter, de se déplacer, de travailler, de manger. Nous sommes à l’aube d’une métamorphose dont il dépend uniquement de nous qu’elle soit joyeuse et démocratique.

Gastronomie climato-compatible

L’agriculture est le premier secteur concerné par le changement climatique, tant celui-ci impacte l’ensemble des facteurs et ressources nécessaires à son bon exercice. Même contenu, même atténué, le changement climatique oblige les agricultures du monde à s’adapter… et le mangeur à changer de régime ! Le modèle agronomique basé sur les engrais minéraux et de synthèse, l’irrigation et la mécanisation va être obligatoirement révisé en fonction des nouvelles contraintes pédoclimatiques, de l’eau renouvelable disponible, de la biodiversité et de la réduction des émissions de GES. On va manger local, de saison, moins carné, avec des variétés rustiques de végétaux, mais peut-être aussi puiser dans les algues ou les insectes les nutriments nécessaires à notre santé. Notre nourriture va changer. Par chance, l’agriculture bonne pour le climat est aussi bonne pour la santé. On va inventer de nouvelles recettes.

Métamorphose joyeuse

Un tel changement rapide – sur les 20 ans à venir – ne peut se faire que dans le dialogue entre paysans et consommateurs. Sinon, on se tapera dessus pour le partage de l’eau voire pour l’usage de la nature. Dans un monde devenu considérablement urbain dans son fonctionnement (même à la campagne), l’acte de manger est banalisé, marginalisé par le tempo citadin, réduit à une nécessité dont on s’acquitte rapidement, sans mâcher et sans goûter à la nourriture. En portant l’attention sur l’empreinte carbone des menus, le climat conduit à la (re)découverte de la nourriture… et des personnes qui la produisent.

Grâce au climat, la ville renoue avec la campagne. Le dialogue doit se faire sur un pied d’égalité, contrairement au passé. On va abandonner la pensée en silo, celle de la logique technique qui mure l’agriculteur dans la monoproduction, qui enferme le citadin dans la malbouffe rapide et obésifiant. Chacun – paysan comme citadin – va recouvrer l’ampleur, la puissance et la joie d’un cerveau complet, capable d’appréhender non plus une chose mais un environnement. Capable d’envisager des territoires précis : lieu de vie et de travail, campagne au milieu de laquelle on vit. Pour notre bien manger et donc notre bien produire, nous allons développer une pensée écosystémique. Nous allons assumer le complexe, en finir avec l’assujettissement consumériste, devenir adultes. Nous allons jouir des complémentarités offertes par la géographie physique et humaine. Quelle belle obligation que celle de faire naître des fermes alentours des villes, des meuniers, des entreprises alimentaires de la région, des commerces de bouche de quartier. La nourriture va symboliquement briller par son lien au voisinage, à la nature, au monde.

Gilles Luneau

 

#EatLocal #MenuForChange #SlowFood

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