Japora, una recette pour la biodiversité
10 Fév 2020

Après être tombés sous le charme de la ville de Posadas, dans la région de Misiones en Argentine, et de son incroyable biodiversité, Angeles et Saul ont décidé d’ouvrir leur restaurant Hoy Cocino Yo en 2010. « Voir une telle abondance de fruits et d’herbes sauvages comestibles pousser dans la rue était un véritable rêve. »
Ils ont alors arrêté d’utiliser des produits importés ou industriels achetés à de gros fournisseurs pour s’approvisionner progressivement en produits locaux. « En découvrant les marchés de commerce équitable, les produits récoltés le jour même et remis en main propre par le producteur, nous avons complètement changé notre mode de pensée. Au début, c’était difficile sur le plan culturel, car le milieu de la gastronomie intègre très peu de produits locaux dans cette province, et la plupart des aliments traditionnels étaient considérés comme singuliers par le grand public. »
Ils ont alors décidé de se plonger dans l’étude des richesses naturelles de la région. « En nous documentant et en visitant la province, nous avons découvert une biodiversité, une abondance et des produits incroyables, mais non commercialisés, ce qui nous a conduits à faire notre propre cueillette. »
Le menu de Hoy Cocino Yo change tous les trois mois, selon ce que le couple déniche aux alentours. Les cocktails du bar sont composés à 100 % d’ingrédients locaux, et les recettes évoluent au fil des saisons. « Notre cuisine repose très largement sur des produits traditionnels ; nous nous inspirons de la culture des Mbyá et de leur cuisine, et utilisons des variétés de fruits indigènes, toute une gamme de champignons sauvages, d’herbes sauvages et de fleurs comestibles. Nous cherchons à mettre en valeur la flore locale pour la protéger, en appliquant de bonnes pratiques pour une utilisation durable et en replantant tout ce qui risque de disparaître, pas seulement dans les zones sauvages, mais aussi dans les zones citadines. »
En cuisinant de bons produits frais, savoureux et saisonniers, ils cherchent à encourager une prise de conscience économique et sociale. Tout en soutenant les fermes [locales], ils assurent consommer « ABSOLUMENT TOUT ce qui est planté dans la province de Misiones. Nous privilégions une agriculture locale, biologique, sans pesticide et qui rémunère justement tous les acteurs de la chaîne de production. »
Ils soutiennent également la biodiversité humaine par le biais d’un « melting pot » au sein duquel ils combinent les matières premières et les techniques de cuisine des différentes cultures de Misiones. Nous cuisinons sur de la « piedra mora » (pierre locale), dans du tacuara (bambou local), nous appliquons des techniques de fumage et de fermentation, nous faisons différents types de conserves, tout en cherchant à exploiter au maximum le potentiel de ces matières brutes de saison dont se nourrit notre cuisine. »
Angeles et Saul soutiennent également les actions de la communauté par le biais de projets sociaux : « Nous travaillons sur un projet de cuisine guaranie appelé Tatarendy, avec une communauté située au centre de la province. Cet échange culturel est très enrichissant et nous essayons de leur donner autant que ce qu’ils nous apportent. »
Ils partagent également des informations précieuses sur les produits locaux sur leur blog « De la Tierra Colorada », en indiquant les noms scientifiques des aliments, leurs différentes utilisations en cuisine, leur histoire et leur lien social avec l’environnement. « Pour savoir où aller, il faut
savoir d’où l’on vient. C’est en partant de l’alimentation qu’on renforce son cercle affectif, son lien avec la terre sur laquelle on vit, avec la famille et son environnement naturel. »
Plat : le Jopara
Le jopara est un ragoût à base d’Avatí (maïs) et de Kumanda (haricots), composé également de tubercules et légumes de saison, ainsi que de viande, si on le souhaite. Le KARAÍ OCTUBRE est une légende guaranie sur un gnome malfaisant qui passe de maison en maison pour vérifier que chaque famille dispose de suffisamment de ressources pour se nourrir pendant la période de plantation des aliments typiques de la région. Un Jopara est préparé le 1er octobre avec tout ce qu’on peut récolter dans son jardin à cette saison, en ajoutant de la viande de gibier. D’après la légende, chaque maison dans laquelle le Karaí réussit à rentrer est alors frappée d’un an de famine et de pénurie. La grosse marmite posée sur le feu indique au Karaí que la famille a été prévoyante en gardant des semences pour la saison prochaine, et le lutin passe alors son chemin.
Cette année, pour préparer notre jopara, nous avons rassemblé neuf variétés de haricots, cinq variétés de maïs indigène, mais également du manioc, de la patate douce, de l’oignon, de l’origan et du persil, ainsi que des champignons sauvages.
Le jopara est la recette emblématique des aliments souverains, car les semences symbolisent l’avenir des peuples et la nécessité de protéger la biodiversité.
Notre jopara :
Manioc et patate douce, coupés en cubes grossiers.
Plusieurs types de haricots et de maïs, recouverts d’eau pendant toute une nuit.
Courge, légumes variés coupés en cubes de 4 cm.
Champignons émincés
Faire revenir : Oignons, ail, céleri et poireau, émincés finement.
Des herbes.
Recette :
– Verser un filet d’huile neutre dans une marmite chaude.
– Ajouter les champignons, faire revenir jusqu’à ce qu’ils prennent une couleur dorée.
– Baisser le feu et ajouter la sauce pour faire colorer l’ensemble, sans le faire brûler.
– Ajouter les haricots, le maïs et un peu d’eau. Faire cuire jusqu’à ce que les haricots soient tendres.
– Ajouter le manioc, la patate douce et les légumes sur feu moyen, saler et poivrer et mélanger régulièrement pour éviter que cela attache.
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